Djemila Zeneidi-Henry, propose l’étude des mythes du vagabond et du clochard. Malgré l’impossible dénombrement des SDF (en France, ils seraient entre 200 000 et 500 000), l’auteur tente de reconstruire leurs origines, leurs trajectoires et leurs perceptions de la ville. Elle pose ensuite les principes de la géographie de l’assistance : " le gîte, le couvert et la survie ". Les réseaux assistanciels favorisent " l’effet de lieu " qui inscrivent ces espaces " en porte-à-faux par rapport aux temporalités urbaines ".
Le travail sur les territoires des SDF pose la question de l’appartenance de l’espace public : rues piétonnes, gares, centres commerciaux. L’oubli de soi conduit à des formes d’exclusion très fortes de l’espace public, du fait notamment de la maladie. Mais une bonne part des SDF, en particulier les jeunes, conçoivent l’espace public comme un " vaste terrain de jeu ". L’errance est alors une quête identitaire et peut aboutir à des formes de structuration qui dénient le système assistanciel.
Faut-il désespérer des pouvoirs publics et de nos sociétés face aux enjeux que posent ces poches de pauvreté dans des villes regorgeant de richesses ? Faut-il stigmatiser à ce point ceux qui ne sont pas acquis à la cause de cette misère et que la mauvaise conscience n’atteint pas ?
Cette géographie de l’extrême pauvreté nous ramène à une expérience urbaine qui a ses codes et ses limites. À ces " exclus ", à ces gens du dehors, elle reconnaît un rôle d’acteurs qui nous mettent toujours au défi de lire la ville comme un espace d’incessantes conquêtes.
(extraits d’un compte rendu de lecture par G. Fumey)